Sport
à sensations et éducation spécialisé ?
La pratique de sports à risque, sous certaines conditions, peut être
un support à la construction identitaire du jeune et à son
autonomisation en valorisant ses qualités personnelles. Elle peut
aider les adolescents à trouver du sens à leur existence sans pour
autant les mettre en danger. Pour Lebreton, elles « ouvrent
une voie propice à l’acheminement du jeune vers l’autonomie.
Elles lui apprennent à mieux se situer face aux autres, déplacent
le jeu symbolique avec la mort ou l’affrontement à la société
vers un espace où ces conduites peuvent être discutées, mieux
comprises, elles (re)construisent l’estime de soi, une meilleure
confiance en ses capacités physiques ou morales »1
• Toute activité sportive présente un risque. Il y a certainement
plus de traumatismes chez les rugbymen que chez les skieurs.
Cependant, l’imaginaire du risque et de son bénéfice appartient à
certaines activités physiques (parachutisme, escalade, kart, sport
de glisse). Pour l’adolescent, les bénéfices pressentis à leur
pratique seraient essentiellement les suivants :
- le développement des capacités du jeune, de sa créativité et
de son courage, qualités dont il doit faire preuve dans le sport à
risque ;
- la prise de conscience par le jeune de ses ressources
personnelles et la fierté d’avoir réussi.2
- valorisation et renforcement de l’image de soi
Ces sports ne sont pas générateurs d’un véritable danger mais
l’appréhension vaut comme une «instance de fabrication de
sens»3,
pour le jeune comme un moyen de s’estimer davantage et d’apprendre
à se situer au sein d’un groupe.
• Les activités à risque de pleine nature « présentent
un avantage très important pour les jeunes en difficulté avec la
loi. En effet, la loi de la nature est tangible, non négociable ou
transgressable. La nature oblige la personne à entrer dans la
logique du vivant, dans la rencontre à l’autre, rencontre passant
par la confrontation des représentations, la relation d’aide »4.
Aussi, il peut être intéressant pour l’éducateur spécialisé de
s’appuyer sur la rencontre entre la limite imposée par le milieu
et celle de la capacité physique et psychologique « naturelle
du jeune ».
La règle et la consigne exposée par l’adulte pourront alors être
perçues par les adolescents comme des facilitateurs de l’activité
permettant d’accéder à plus de liberté donc à davantage de
sensations.
Pour autant, l’activité sportive ne soit pas être idéalisée. La
seule pratique d’un sport à risque ne suffit pas à créer un
changement de conduite chez le jeune.
La première limite vient du fait que proposer une pratique sportive
« à risque » pourrait participer à l’accentuation des
comportements, voire même encourager un processus d’addiction au
risque.
La deuxième limite est liée au risque de proposer le sport comme
une simple activité occupationnelle dominée par la logique de
consommation.
2.1.3. Quelle place pour
l’éducateur spécialisé ?
Afin de dépasser ces deux limites, il me paraît essentiel
d’inscrire l’activité sportive à risque dans un projet qui lui
donnera alors une dimension éducative. Les potentialités qui se
dégagent de ce support éducatif devront être exploitées,
cultivées. A l’action doivent s’associer un discours et une
réflexion porteurs de changement. « De la même manière
qu’ils ont du mal à anticiper une situation, certains jeunes ne
semblent pas découvrir leurs capacités au cours d’une activité
[…] Rien ne s’inscrit en tant qu’évènement dont on peut avoir
la maîtrise et dont la prise de conscience du cheminement pour y
aboutir autorise la répétition rassurante »5.
Il faudra également permettre au jeune de verbaliser les sensations
et émotions ressenties en instaurant les conditions nécessaires à
l’échange.
Capul et Lemay s’appuient sur la notion de F.Redl en évoquant
l’« entretien sur le champ » qui, étant directement
lié à une expérience qui vient d’être vécue, permet notamment
d’aider le jeune à traduire les affects au moment où ils
viennent d’être ressentis et de « prendre conscience sur le
champ »6 de
certains comportements.
L’éducateur spécialisé doté de certain diplômes
complémentaires peu assurer des activités tels que skate, vtt
(classe 3 max), escalade…et faire les retours en fin d’activité.
Si il n’est pas apte à assurer l’activité, c’est alors un
professionnel breveté qui doit s’en charger.
Dans cette optique, le fonctionnement de l’activité sportive est
intéressante si il permet à l’éducateur spécialisé de
développer une observation participative et de se concentrer sur la
dimension éducative de l’activité en se dégageant de la
dimension technique et pédagogique (didactique de l’activité,
travail sur la performance…) assurée par l’éducateur sportif.
• Afin de renforcer la dimension valorisante de cette activité et
de transposer une possible réussite du jeune de l’extérieur
(spécificité de l’activité physique) vers l’intérieur du
service, il est possible de prendre des photos en cours d’activité.
Chaque jeune et parents devront signer en début de prise en charge
un document qui autorise la prise de photo et de vidéo dans le cadre
des ateliers.
1
LE BRETON D., Sociologie du risque, PUF,
2
MACHARD L. (rapporteur) SPORT, ADOLESCENCE ET FAMILLE, Rapport
remis au Ministère de la Santé, de la Famille et des Personnes
Handicapées - Ministère délégué à la Famille Ministère des
Sports en Novembre 2003
3
LE BRETON D., Conduites à risque, op.cit, .
4CLEMENT
M., Sport et insertion, éditions Presses Universitaires du Sport,
2000, p159
5
CAPUL M.et LEMAY M. , op.cit., p 216
6
Ibid, p220
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